mardi 3 juin 2008

to hunt

C'était la rentrée et j'allais la retrouver. J'avais déjà choisi avec soin ma tenue la veille. Il faisait beau. Je repensais à l'année dernière, cette obsession qu'elle avait avec le diabolo cassis - elle faisait suite à celle du nectar d'abricot. A chaque fois qu'on débarquait au café, elle balançait son sac mollasson d'un grand geste sur la table qu'on aimait bien, se laissait tomber de tout ses cinquante kilos sur la banquette, et, avec la même opiniatreté, commandait un diabolo cassis avec de grands yeux d'enfants. Une fois, deux fois, cinquante fois. Si bien qu'à la fin, le patron l'a commandé, ce sirop de cassis, et lui a fait une private joke sur la carte. Je me demande à quelle obsession le diabolo cassis va faire place, quelle petite lubie ridicule et indispensable aura germé dans sa tête durant cet été, si, à présent elle boit un café au lait avec la couleur parfaite, la quantité de sucre idéale, et la température optimale, comme la fille du film de Jarmusch qui traffiquait sa tasse de café au son de Crimson and Clover.

Dans la rue je l'ai aperçue rapidement : ses cheveux bouclés, qu'on disait sauvages, sa démarche chaloupée, le sac au creux du coude, battant à chaque pas contre sa cuisse maigre. Un sourire, un signe de main, quelque chose de brûlant traverse mon corps. C'est elle, avec la promesse de s'amuser et de se comprendre.

Il n'y a rien comme l'existence d'autrui, son regard posé sur soi : c'est l'assurance que quelqu'un te tiendra la main, répondra à ton appel, te suivra partout. Et c'est indispensable.

Elle me dit vivement, en entourant brusquement ma nuque de ses long bras, "c'est TROP bien de te revoir", m'emboîte le pas, nos chevilles se cognent, le temps reprend. J'ai l'impression d'avoir retenu ma respiration tout un été durant, et là, en entendant sa voix un peu trop haut perchée, je fonce tête baissée dans notre vie et tout ce qui nous attend. Ses écouteurs d'ipod balancent le long de sa gorge : elle écoutait Pigs In Zen, ses pieds nuds flottent dans ses ballerines, je la retrouve comme je l'avais quittée : approximative et violente.

La lumière est claire, dans quelques minutes on retrouvera les autres, j'ai eu pour moi ce premier instant, son corps s'élançant sur le trottoir, la gaieté ineffable des retrouvailles, et ma hâte de tout vivre auprès d'elle.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

ma ma ma ma ma piiiiiiiiiigs!