vendredi 31 décembre 2010

Elle et sa copine avait passé l'après midi à resasser des histoires de coeur mal foutues, j'écoutais en silence, autour de nous traînaient les lectures de l'été de la mère de Lou, toutes obsessionnellement cornées, et puis en étirant ses jambes, Lou disait, "c'est quand même plutôt facile, la vie, en général".

Cette assertion marquait la fin de la conversation, elle allait se préparer, rassembler ses affaires (jamais grand chose), qu'elle appelait "impedimenta", et, d'un pas leste, rejoignait son quartier favori : la plage face à l'océan. J'étais invité à la suivre.

Ce que j'aimais chez Lou c'est ce que j'y voyais : une fille qui n'a pas de filtre, complètement vraie et poreuse. J'étais tombé amoureux de sa nuque tendue, de ses yeux intelligents et de sa voix qui perçait l'air avec confiance. Elle n'était pas spécialement sûre d'elle, mais elle parlait avec simplicité et honnêteté. Quand elle s'entichait de quelque chose c'était toujours très simple et très certain. Par exemple, en ce moment c'était la mer. Alors elle regardait le port d'échouage devant lequel on passait en rentrant le soir, lorsque la lumière déclinait et faisait des reflets sur les voiles affalées, avec une émotion assez pure, comme une satisfaction générale et pleine, un peu dans le tragique. Elle reprenait sa route la mine haute, changeait de sujet rapidement : où fallait-il boire un verre ce soir ? mais impossible d'ignorer qu'elle avait repris son souffle un instant.

jeudi 30 décembre 2010

Je regarde le froid dehors. Je suis dans mes 5' où je somatise pas, ou à peine, où je suis une femme indépendante et les sentiments sont bourgeois. Où, en guise d'introspection je fais semblant de ne pas avoir de curseur moral. Bon, comme c'est récent, je ne parviens pas encore à savoir si cette nouvelle orientation de mon existence m'est profitable ou non. Ce n'est pas complètement désagréable d'avoir congédié le Politburo de la bonne conduite et de ne plus vraiment réfléchir aux conséquences (ou significations en fait) des actes et des paroles que je prononce, mais pour le moment, je ne sais pas encore si c'est pour moi.

La nonchalence, rentrer en taxi à tout bout de champ, ne pas arrêter de fumer, pleurer (à moitié seulement). J'essaye d'agir pour me donner une vague contenance, mécaniquement, je réponds et relance la conversation, sans en avoir quoi que ce soit à tirer des réponses, comme lui, je les écoute distraitement et je nous sens tristes, fatigués, las. Comme si l'essentiel n'était pas là. Les jours s'amoncellent, ma solitude augmente, les minutes s'égrennent de façon désordonnée et l'été paraît loin. Loin et ridicule. Je ne sais plus précisément ce à quoi me rattacher, puisque j'ai entrepris, dans mon élan d'indépendance à l'égard du monde et de mes 20 ans, d'arrêter la planification et les résolutions. Rien du tout à l'horizon, calme tranquille, encéphalogramme plat, si ce n'est le moment, précieux, pour lequel je suis assoiffée, où il effleure mon poignet. Rien de plus. J'aurai fait la parfaite héroïne d'un roman du 19è : je rougis quand on m'embrasse l'épaule. Je ne connais pas encore mon sort et je m'en fous, j'ai à chaque fois l'impression de me jeter quelque part et que seules m'accompagnent nos tristesses relativement mal accordées. Fidèles au poste, solidaires et dévouées.

Mais parce que c'est si agréable et que je ne recherche de toutes façons plus rien d'autre depuis des semaines, je décide que tout dans la vie est énergie, c’est ça ou bien les choses vous sucent comme des vampires.