jeudi 11 novembre 2010

- "Oui, ça dégringole et c'est chiant. J'en ai conscience.", je disais d'une voix à la fois lasse et excédée. J'ai toujours détesté être le centre d'attention, qu'on s'attarde trop sur moi, et spécialement sur mes humeurs. Elles ne valent pas le coût. Qu'il y accorde de l'importance en fait, ça me décevait. C'était indigne, inutile.
- "Mais il va falloir faire quelque chose. Tu ne veux pas continuer comme ça ?"
- "Quelle importance ? Je passe de bonnes journées"

Passer de bonnes journées, on va pas en chier des pages et des pages, ça me suffit.

Manifestement, l'argument a fait mouche, il se tait. En fait il me regarde l'air absolument atterré, et j'avoue que ça me fait bien rigoler intérieurement d'avoir formulé une telle réponse quand on sait précisément à quoi je consacre mes journées : on m'a par exemple vu pleurer au monoprix, je n'ai pas démélé mes cheveux depuis probablement 21 jours (date de la fête de Coline), une valise éventrée traîne dans ma chambre depuis mon retour de vacances. Bref, de bonnes journées ! Indéniablement.

Pas du tout habitée par ma crainte et mon obsession de ne pas le retrouver le soir. Prétendre pendant trois heures - nous sommes patients et des êtres d'une froideur exquise, qu'il ne m'attire pas, rester à 50 cm l'un de l'autre, sur deux sièges différents s'il le faut, pour fondre l'un sur l'autre finalement, à un moment critique, presque avec maladresse, et puis alors il m'embrasse de tout son corps et je brûle qu'il me déshabille. Une fois l'affaire faite, plus un mot. Par contre, il arrive que je pleure quand il va me chercher un verre d'eau.

Et quand je pleure, il pose fatalement la question : "mais ça va ?". Et c'est là que je réponds des trucs sur la dégringolade, la dépression, le fait que je fasse absolument n'importe quoi, mais, soit disant, les journées sont bonnes.

Alors que rajouter ? Je termine de m'habiller, je lève le menton haut, je fais mine d'être vexée par ses inquisitions (d'ailleurs, je suis vexée, savoir si je vais ou pas, c'est pas tellement la question), je me précipite vers la porte et le lendemain j'attends son appel, son signal, j'avale les stations de métro jusqu'à chez lui, toujours chez lui, et la journée commence enfin. La bonne journée j'entends.

Je boude et je râle, mais je crois que je suis amoureuse.